Ancienne usine à valves située à Lachine, la Jenkins deviendra après sa fermeture un immense terrain de jeux pour les graffiteurs. Repère prisé de la sous-culture, elle restera abandonnée pendant plus de 10 ans et sera finalement démolie en 2004.

Le livre a les entrevues, oeuvres et photos de: C’Lok, Some, Smak, Kers, Jaber, Shok, Stack, Fluke, Sniper, Ether aka Cemz, Morz, Sober, Killa-EF, Bez, Cyens, Nixon, Scaner, Meor, Vesk, Her, Simo, Jake.

Avec le lancement du livre, nous avons eu le plaisir d'interviewer, Vincent Tourigny,  l'auteur de La Jenkins.

Qu’est ce qui a commencé votre intérêt pour le monde du graffiti?
J'ai grandi à Lachine dans les années 90 à l'époque où la ville était recouverte de graffitis. Enfant, j'ai toujours dessiné et le graffiti est arrivé par la force des choses, presque logiquement. Je ne me suis jamais posé de question, c'était quelque chose que j’aimais faire.

Comment comparez-vous la communauté graff de Montréal à d'autres villes? Que pensez-vous du graffiti d'aujourd'hui, en tant que mouvement?

La seule scène que je connais bien est celle de Montréal, celle où je peignais. Par contre, je crois qu'avec l'arrivée de l'internet, les frontières entre les villes sont moins importantes. Les styles se mélangent plus facilement et les graffiteurs d'aujourd'hui sont influencés par des artistes de partout à travers le monde. Dans les années 90, la scène graffiti montréalaise était tissée très serrée. Les graffiteurs s'influençaient entre eux et il fallait se déplacer physiquement pour découvrir les graffitis. Les tutorials YouTube pour apprendre à peindre et les boutiques en ligne de paint n'existaient pas. Ce qui est bien de nos jours, c'est qu'il est beaucoup plus facile de rencontrer des graffiteurs de partout à travers le monde et de peindre dans différentes villes du globe grâce au web
Qu'est-ce qui vous a inspiré à créer le livre La Jenkins?

Depuis longtemps, j'avais le désir de faire un livre sur le graffiti à Montréal, quelque chose à propos de ce que j'avais vu en grandissant. Je voulais parler des gens que j'ai rencontré en cours de route sans pour autant être nostalgique.

La Jenkins c'était le spot à côté de chez nous. C'est là que j'ai vu mes premières productions, pièces et caractères. La plupart des graffiteurs à Montréal y ont peint entre 1995 et 2004. C'était un endroit connu de la scène graff et j'avais des photos de l’endroit avant sa démolition. Aussi, j'avais envie de faire revivre un lieu à travers différentes années. C'était logique pour moi de partir mon récit à partir de là.
Quel a été le processus de création du livre?

J'ai mis plus de deux ans à ramasser des photos et interviews pour me permettre de réaliser une première maquette. Ça m'a permis de renouer avec plusieurs personnes car une grande partie du travail a été de chiller avec beaucoup de writers! Sans rien connaitre du milieu de l'édition et avec un projet plutôt hors norme entre les mains, j'étais vraiment obstiné à faire publier celui-ci. Quand j'ai finalement approché Possibles Editions, et ça a cliqué! Étant graphiste, j'aimais beaucoup leurs publications antérieures qui sont de véritables objets de collection. Eux, ils ne connaissaient pas du tout le milieu du graffiti mais étaient curieux. Nous avons retravaillé tout le matériel que j’avais accumulé pour faire un livre au contenu authentique avec un visuel travaillé. Par exemple, chaque couverture est sérigraphiée et numérotée; les reliures sont cousues et le livre comporte des insertions monochromes imprimées à la riso. De leur côté, ils ont permis de rendre le livre accessible à un public non initié. Le processus d'édition n'a pas suivi de chemin traditionnel. Dans cette histoire, tout le monde a eu les mains dans la colle, l'encre et les mots. Ça a été un véritable travail d'équipe!
La Jenkins est l'un des premiers livres sur le graffiti à Montréal. Pourquoi pensez-vous que d'autres livres n'ont pas été écrit sur ce sujet avant?

Le graffiti c'est quelque chose d'éphémère. C'est une sous-culture difficilement accessible de l'extérieur. Les gens sont parfois méfiants et ne veulent pas parler à n'importe qui s'improvisant sur la question. Il faut parler aux bonnes personnes et ça demande beaucoup de temps. Aussi, en général, les photos ne sont pas à proximité… elles sont rangées dans des boîtes depuis des années. L'accessibilité au contenu a été laborieuse dans mon cas. Ça prend un minimum de connaissance de la scène et beaucoup de motivation. Après, il faut des gens assez fous pour croire en ton projet! Même si ceux-ci font partie de nos vies au quotidien, Il y a souvent beaucoup de préjugés et de confusion autour des graffitis, peu de personnes connaissant réellement la sous-culture, son langage et ses codes.
Avez-vous des idées pour un deuxième livre? Quels sont vos projets pour la suite?

Faire ce livre a été un gros défi et je suis très heureux et satisfait de voir celui-ci se concrétiser. C'est un peu ma manière à moi de redonner à la scène graffiti à Montréal qui a forgé qui je suis aujourd'hui. Pour le moment, je n'ai pas l'intention de publier un autre livre sur le sujet (bien que j'espère avoir motivés quelques uns à faire de même). Maintenant illustrateur et designer, une chose est certaine, je compte continuer à dessiner, comme je l'ai toujours fait!
Joigez-vous à notre soirée de lancement ce vendredi à compter de 17h.Cliquez ici pour acheter votre copie.